Le monde de la culture et d’Internet est en ébullition depuis qu’une prouesse technologique liée à l’intelligence artificielle a été réalisée : la recréation de la voix française iconique de Sylvester Stallone, celle du regretté Alain Dorval, décédé l’an dernier. Cette initiative, mise en place pour le film Armor, prévu sur Prime Vidéo en mars prochain, suscite un débat intense entre hommage et malaise.
Les réactions partagées
Alain Dorval était une légende du doublage français, connu pour avoir donné vie à Rocky Balboa et John Rambo. Recréer sa voix grâce à l’intelligence artificielle a été possible grâce aux start-ups Lumiere Ventures et ElevenLabs. Leur technologie a permis de reproduire une voix qui, pour beaucoup, est ancrée dans l’imaginaire collectif. Cependant, la publication de la bande-annonce sur les réseaux sociaux a rapidement provoqué une vive polémique.
Derriere cette affaire se trouve un nom bien connu du paysage politique français : Aurore Bergé, fille d’Alain Dorval et actuelle ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes. Sur les réseaux sociaux, elle a expliqué que cette initiative avait pour but de préserver l’héritage de son père. Dans une déclaration, elle a affirmé :
« Il ne s’agit pas de créer une nouvelle voix artificielle, mais de préserver celle qui est ancrée dans notre imaginaire collectif. »
Cependant, elle a démenti avoir validé la diffusion de cette bande-annonce en l’état, ajoutant qu’elle avait donné son accord uniquement pour un essai. Elle a dénoncé une violation des engagements qui garantissaient que rien ne serait publié sans l’approbation de sa famille.
Le milieu du doublage scandalisé
Pour certains, cette initiative représente un hommage à un grand nom du doublage français. Pour d’autres, notamment les comédiens de doublage, il s’agit d’une menace directe pour leur profession. Sur les réseaux sociaux, le comédien Donald Reignoux, voix française de Titeuf et Spiderman, a interpellé Aurore Bergé en ces termes :
« Votre père était un grand monsieur du doublage. Je pense qu’il n’aurait pas aimé poser le premier pas vers la destruction du métier qu’il a tant aimé et défendu. »
La polémique intervient dans un contexte où les comédiens de doublage expriment de plus en plus leur inquiétude face à l’émergence de logiciels d’IA capables de reproduire leurs voix à moindre coût. En décembre dernier, une centaine de professionnels ont manifesté à Paris contre ces pratiques, accompagnés d’une pétition intitulée #TouchePasMaVF, qui a recueilli plus de 162 000 signatures.
Une réflexion à mener
Ce n’est pas la première fois que l’intelligence artificielle s’invite dans le monde du cinéma. Des exemples comme le rajeunissement d’Harrison Ford dans le dernier Indiana Jones ou la recréation numérique de Carrie Fisher pour Star Wars montrent que cette technologie est déjà présente. Cependant, redonner une voix à un artiste disparu semble toucher une corde encore plus sensible.
Cette affaire pose une question cruciale : comment encadrer l’utilisation de l’intelligence artificielle dans des domaines aussi chargés d’émotion et de mémoire collective ? Pour les comédiens de doublage, l’urgence est claire : il faut des règles strictes pour garantir que ces usages soient consentis et respectueux. Quant au gouvernement, il est temps de se positionner face à une technologie qui redéfinit les frontières de la création artistique.