Avec son nouveau film, Paul Thomas Anderson signe une œuvre atypique, à la fois critique sociale, récit d’aventure et fresque familiale. Une bataille après l’autre ne se contente pas de raconter l’histoire d’un père et de sa fille : il interroge, en filigrane, les contradictions profondes de la société américaine.
Une histoire servie par son casting
Le film met en scène Bob Ferguson (Leonardo DiCaprio), ancien activiste révolutionnaire, aujourd’hui père cabossé, noyé dans l’alcool et les drogues, contraint de reprendre du service quand sa fille Willa (Chase Infiniti) disparaît. Sa quête le confronte à des fantômes de son passé et à un colonel suprémaciste (Sean Penn) bien décidé à les anéantir, tandis qu’un maître de dojo (Benicio Del Toro) se joint à la bataille.

Le film s’appuie sur une distribution solide. DiCaprio, parfait en père cabossé par ses excès, compose un personnage à la fois pathétique et combatif. Chase Infiniti donne une belle présence à l’adolescente qu’il tente de sauver, et leur duo crée une dynamique touchante. Benicio Del Toro, en maître de dojo inattendu, ajoute une note d’ironie et de sagesse. Enfin, Sean Penn campe un colonel inquiétant, figure autoritaire et brutale, dont la menace plane sur toute l’intrigue.
Une critique sans concession
Le film ne cherche pas à coller au réel : il s’autorise des scènes volontairement improbables, moments de pure virtuosité visuelle. Anderson aime aussi jouer avec l’absurde, notamment à travers des running gags sur les mots de passe révolutionnaires. Ces touches d’humour et de décalage viennent alléger une histoire par ailleurs traversée de violence et de tension.

Sous ses allures de divertissement, Une bataille après l’autre s’attaque aux travers de l’Amérique contemporaine. Les suprémacistes blancs y apparaissent grotesques et dangereux, tandis que les révolutionnaires radicaux sont dépeints comme désorganisés et stériles. Dans cet univers, seule la jeune fille incarne une forme de sincérité et d’espoir.
Si l’on peut reprocher à l’ensemble quelques longueurs et un rythme parfois flottant sur près de trois heures, l’expérience reste singulière. Les excès, les ruptures de ton et les scènes inattendues donnent au film une personnalité à part. Derrière ses détours et ses excentricités, Une bataille après l’autre s’impose comme un portrait tendre et chaotique d’une relation père-fille, mais aussi comme une satire acide d’un pays en crise permanente.
Une bataille après l’autre est un film imparfait certes, mais il est aussi d’une audace et d’une originalité qui le rendent difficile à oublier.