Entre introspection, légendes japonaises et spectaculaire, le premier long métrage de David Tomaszewski, coécrit avec Orelsan, offre un mélange étonnant de réalisme et de fantastique.
Un conte surnaturel à la française
Après une tournée épuisante, Aurélien (alias Orelsan) décide de quitter la France pour s’installer au Japon avec sa compagne Nanako, enceinte de leur premier enfant. Dans la quiétude d’une maison traditionnelle, il découvre une mystérieuse armure au fond d’un puits. Ce vestige du passé va bientôt libérer des créatures issues du folklore japonais : les Yokaïs.
Ce point de départ, à la frontière du conte et de la fable moderne, sert de fil conducteur à un récit aussi intime que fantastique.
David Tomaszewski s’amuse à brouiller les frontières entre réalité et fiction. Le film met en scène Orelsan dans une version imaginaire de lui-même, entre le rappeur connu du grand public et l’homme qui cherche un nouveau sens à sa vie.
Le mélange entre culture urbaine et mythologie japonaise fonctionne étonnamment bien. Les Yokaïs, parfois terrifiants, parfois drôles, incarnent les peurs et les émotions refoulées du protagoniste.
Un spectacle visuel et sonore maîtrisé
Visuellement, Yoroï est une réussite. La photographie magnifie un Japon à la fois poétique et saturé de couleurs. Les décors jouent sur le contraste entre la France et le pays du Soleil-Levant, renforçant le sentiment de déracinement du héros.
Les effets spéciaux, d’un très bon niveau, participent pleinement à l’immersion. L’armure, au cœur du récit, impressionne par son design soigné. Quant aux scènes d’action, nombreuses et chorégraphiées avec précision, elles trouvent le juste équilibre entre intensité et humour, glissant parfois vers un burlesque assumé.

Face à la caméra, Orelsan s’en sort admirablement. Il joue avec autodérision ce double de lui-même. Sa partenaire Clara Choï, qui incarne Nanako, dégage une énergie à la fois douce et puissante : son personnage de combattante d’arts martiaux apporte une belle complémentarité à l’ensemble.
Un film imparfait, mais profondément sincère
Si Yoroï tend parfois à se répéter et peine à maintenir sa tension jusqu’à la fin, le film n’en demeure pas moins captivant. Derrière l’action et le fantastique, il parle surtout de transformation personnelle, d’amour et d’acceptation de soi.
La musique, intégrant plusieurs morceaux d’Orelsan, ajoute une touche personnelle et renforce le lien entre l’artiste et son œuvre.

Proche par moments de l’esthétique manga, Yoroï jongle habilement entre le divertissement pur et une réflexion plus intime sur le rappeur français. Ce mélange de cultures et de genres, en fait un objet cinématographique pour le moins singulier dans le paysage français.
En somme, Yoroï est un film imparfait, parfois redondant, mais généreux, drôle et touchant. Entre le mythe et le réel, Orelsan et Tomaszewski signent une aventure humaine et fantastique qui sort des sentiers battus. Un spectacle pop, coloré et profondément personnel.
