Game of Thrones reste l’une des séries les plus marquantes de la télévision moderne. Portée par un univers riche en intrigues politiques, maisons rivales, trahisons, dragons et magie, elle semblait être une candidate idéale pour des adaptations vidéoludiques ambitieuses. Pourtant, plus de dix ans après le début de son exploitation en jeu vidéo, aucun titre n’a véritablement su convaincre les joueurs. Et malheureusement, Game of Thrones : King’s Road, dernier-né de la licence, ne fait pas exception.
Un potentiel vidéoludique gâché
Disponible depuis peu sur mobile et PC, King’s Road se présente comme un action-RPG développé par un studio encore inconnu du grand public (netmarbleNeo). Dès les premières minutes, les problèmes sautent aux yeux (et aux doigts) : graphismes datés, animations peu fluides, combats sans dynamisme…
Et surtout, un modèle économique agressivement pay-to-win. Boosters, coffres, classes verrouillées : tout pousse le joueur à passer à la caisse s’il souhaite progresser à un rythme décent. Le jeu propose trois classes de personnage, mais l’ensemble paraît creux et calibré avant tout pour maximiser les microtransactions. Une expérience qui frustre, bien plus qu’elle ne captive.

Ce nouvel échec est d’autant plus regrettable que Game of Thrones dispose de tous les ingrédients pour devenir une franchise vidéoludique majeure. L’univers aurait pu donner naissance à un RPG à la Witcher, à un jeu de stratégie inspiré de Total War, voire à un Skyrim-like dans les terres de Westeros. Pourtant, la licence continue de s’enliser dans des productions médiocres, souvent oubliables.
La difficulté principale réside sans doute dans la structure narrative de Game of Thrones : il n’y a pas un seul héros, mais des dizaines de personnages majeurs. Choisir d’incarner Jon Snow, Arya Stark ou Daenerys Targaryen revient à privilégier une vision au détriment des autres, ce qui peut poser de vrais problèmes de cohérence.
Cela dit, un bon jeu n’a pas forcément besoin de suivre la trame officielle. L’univers peut servir de toile de fond à une histoire inédite, comme l’ont brillamment démontré L’Ombre du Mordor et L’Ombre de la Guerre pour la saga Le Seigneur des Anneaux.

Le public est toujours là, mais qu’attend-on ?
Au-delà des choix narratifs, le principal frein semble être le manque d’ambition des ayants droit. Depuis le début, ni HBO ni Warner Bros Discovery n’ont confié la licence à un grand studio. Aucun projet signé Naughty Dog, Ubisoft ou From Software. En lieu et place, ce sont des studios modestes, au budget limité, qui ont hérité de la tâche, avec toutes les contraintes que cela implique. Résultat : une avalanche de jeux mobiles peu inspirés et de projets à la portée trop réduite pour faire honneur à l’univers original.
Ce constat est d’autant plus regrettable que l’intérêt du public, lui, ne faiblit pas. Si la fin controversée de la série principale a laissé un goût amer, le spin-off House of the Dragon cartonne et une saison 3 est déjà attendue avec impatience. L’engouement pour Westeros est toujours bien vivant.

Par ailleurs, l’industrie du jeu vidéo a largement prouvé qu’elle sait aujourd’hui traiter des récits politiques et matures. Des titres comme Expedition 33, Kingdom Come: Deliverance 2 ou encore Baldur’s Gate 3 montrent qu’il est tout à fait possible de proposer des expériences complexes, profondes et ambitieuses.
Mais cela demande une chose essentielle : y croire. Et surtout, accepter de prendre des risques, de faire un vrai pari artistique.
Game of Thrones : King’s Road ne sera pas le jeu que les fans attendaient. Loin d’être à la hauteur de son nom, il s’ajoute à une liste déjà longue de tentatives ratées. En attendant qu’un grand studio ose enfin se lancer dans une adaptation digne de ce nom, les joueurs devront se contenter d’expériences anecdotiques. Un comble, pour une œuvre aussi riche.